
photo: Pierre Dury
Surprenante basilique Saint-Patrick
29-08-2025





À la découverte d’un autre lieu montréalais où je ne suis jamais allé.
Après une visite chez mon dentiste, qui a son bureau sur Beaver Hall, j’ai décidé mercredi de pousser la porte de la basilique Saint-Patrick juste à côté, là où Brian Mulroney a été exposé en chapelle ardente en mars de l’année dernière.
À 10 heures du matin, les portes étaient bel et bien ouvertes. Nous étions seulement trois dans l’église. Quel contraste avec la basilique Notre-Dame où on fait la queue pour entrer!
Et pourtant, que de surprises dans cet édifice religieux!
À commencer par les couleurs de la décoration (même si très loin du très beau bleu de la basilique Notre-Dame), et le silence. La sainte paix sous ce toit, alors qu’on est en plein centre-ville dans un quadrilatère formé des rues De La Gauchetière, Bleury, Beaver Hall et du boulevard René-Lévesque.
Étrangement, l’adresse est le 454 René-Lévesque Ouest, angle Saint-Alexandre, mais le majestueux lieu de culte tourne le dos au grand boulevard. L’entrée donne plutôt côté sud, sur De La Gauchetière qui se trouve en contrebas. Il y a bien un escalier qui mène à la rue, mais il est condamné.
On a souvent des à priori dans la vie. Je m’attendais à une église très anglaise, faite par des Anglais. Erreur! J’avais oublié que cette église a été construite pour la communauté irlandaise, catholique comme les Québécois.
En passant, la première messe dite en cette église l’a été le 17 mars 1847, jour de la Saint-Patrick, patron des Irlandais qui a sa statue à l’entrée.
En raison de toute son histoire, l’église Saint-Patrick a été élevée au rang de basilique mineure par Jean-Paul II. Quand? Je vous le donne en mille, un 17 mars. De l’année 1989, à suite d'une demande du cardinal Paul Grégoire, archevêque de Montréal.
C’est tout de même impressionnant de voir le nombre de ‘’Canadiens-français’’ impliqués dans sa construction.
À commencer par l’architecte qui s’appelle Pierre-Louis Morin (1811-1886) qui est, plus précisément, un français né à Nomencourt en Normandie et qui a étudié à Chartres.
Sur ce projet, il a travaillé avec Félix Martin (1804-1886), jésuite, né en France lui aussi, à qui on doit la fondation du Collège Sainte-Marie, institution fondée en 1848 qui se trouvait à proximité de la basilique. Aujourd’hui, sur le site de l’ancien collège Sainte-Marie se dresse, entre autres, la tour Félix-Martin, siège social de SNC-Lavallin (aujourd’hui AtkinsRéalis).
Morin et Martin s’intéressaient à l’architecture médiévale française et en possédaient une solide connaissance grâce à des études sur le terrain.
‘’La basilique St. Patrick est un exemple remarquable de l’architecture néo-gothique d’inspiration française et une des premières réalisations de ce genre’’, nous informe le site des Lieux historiques nationaux du Canada.
Le Répertoire du patrimoine culturel du Québec ajoute:
‘’Le style néogothique prône un retour aux formes du Moyen Âge, tout particulièrement à celles des XIIIe et XIVe siècles, et se définit entre autres par la recherche de verticalité, la symétrie et la lisibilité du plan.’’
Quand on est Québécois francophone, impossible de ne pas remarquer les nombreuses fleurs de lys dans le décor de l’église qui compte aussi son lot de trèfles à trois feuilles symbole irlandais par excellence. Ces décorations sont le fait de l’artiste montréalais d’origine italienne Guido Nincheri (1885-1973) qui les a peintes au pochoir.
De nombreux Canadiens-français sont impliqués dans ce vaste projet de construction.
La première décoration a été supervisée par Victor Bourgeau. L’autel principal et les deux autels latéraux sont l’œuvre de Perrault, Paré et Ouellet.
L’orgue, fabriqué originellement par la compagnie Warren d’Angleterre, a été plus tard reconstruit par Casavant & Frères.
Orgue Providence, également de Saint-Hyacinthe, y ajoute par la suite des pièces récupérées de l’orgue de l’église St. Anthony de Montréal lors de sa démolition. L’instrument d’aujourd’hui porte le numéro opus 2268.
Autre récupération, la ‘’Charlotte’’, cloche de l’ancienne église Notre-Dame, démolie en 1843, l’année où commencèrent les travaux de construction de la basilique des Irlandais. Cette cloche a été coulée en 1774!
Au fil des ans et des restaurations, plusieurs anglophones ont mis leurs pattes à la décoration de l’église. La firme Rambusch de New York et Toronto a notamment refait l’éclairage en 1980.
Quand je disais que cette église réserve toutes sortes de surprises, j’ajoute, pour ceux qui m’ont lu jusqu’ici, deux ‘’fun facts’’ pour vous récompenser!
Deux faits historiques qui font d’ailleurs l’objet de plaques commémoratives à l’arrière de l’église.
1. Notre grand poète national Émile Nelligan, qui a des origines irlandaises, a été baptisé dans cette église en 1879.
2. Les obsèques de Darcy McGee, un des pères de la Confédération canadienne, membre éminent de la paroisse St. Patrick, ont eu lieu en cette église après son assassinat à Ottawa en avril 1868, alors qu’il n’avait que 42 ans.
En ce qui me concerne, la chose la plus surprenante que j’ai vue parmi toutes ces images de saints peintes à l'huile sur le lambris de cette église, c’est celle d’un Saint …. en polo et baskets!
Parmi les images pieuses exposées, on retrouve en effet un représentation de Saint Carlo Acutis.
Je ne savais rien de ce jeune Saint avant de lire ceci sur Wikipédia :
‘’Carlo Acutis, né le 3 mai 1991 à Londres et mort le 12 octobre 2006 à Monza d'une leucémie, est un adolescent italien. Il est connu comme le « cyber-apôtre » des miracles eucharistiques et des apparitions mariales. Il est vénéré comme bienheureux par l'Église catholique et fêté le 12 octobre’’.
Eh ben coudon! Un cyber apôtre! On en apprend tous les jours. Ça a fait ma journée, et incité à donner un 5 piasses à la borne ‘’TAP an GIVE’’!
Après ça, j’ai refait le tour pour apprécier les bancs, chaires et escaliers sculptés dans du chêne rouge de l’Indianna, et à m’imprégner de ce camaïeu de couleurs inspiré du bois. Même les calorifères à eau chaude et les tuiles du parquet sont dans la bonne palette de couleur.
En revenant à la maison, quelle surprise d’apprendre que l’architecte de la basilique Saint-Patrick, Pierre-Louis Morin, est également l’architecte de la Maison Masson, dont on dit qu’elle est probablement la plus ancienne demeure bourgeoise de la rue Dorchester. Elle est toujours debout, belle et fière, à côté de chez moi, au 2080 boulevard René-Lévesque Ouest. Mon petit Trianon!
On doit aussi à P.L. Morin le Séminaire de Saint-Hyacinthe.
